Dossier de presse
Conférence de presse du 15 octobre 2020
Créons une « Régie Agricole Communale » à Liège
Proposition de Vert Ardent dans le cadre de la Journée mondiale de l’alimentation 2020
—
Introduction
Vert Ardent travaille depuis sa création à la question de la qualité des repas fournis par l’intercommunale ISosL. Nous avons organisé une visite de cette structure et participé via nos interventions au Conseil communal à relayer certaines demandes d’améliorations (fin de l’utilisation de barquettes en plastique jetables, introduction de repas sans viande…).
Cette intercommunale est aujourd’hui en charge de la préparation des repas pour tous les enfants de l’enseignement communal liégeois, des crèches aux écoles (ainsi que d’un petit nombre d’établissements hors de Liège). L’intercommunale, spécialisée dans la santé, est également en charge de la préparation de repas pour ses établissements de soin, et pour le CPAS (repas à domicile).
Offrir aux plus jeunes, aux personnes aux revenus modestes, comme à nos aînés (à domicile ou dans des établissements de soin) une nourriture de qualité est une mission essentielle pour des pouvoirs publics.
La situation actuelle
Afin de travailler sur les coûts et d’offrir une infrastructure professionnelle répondant aux normes sanitaires strictes en vigueur (notamment de l’AFSCA), la Ville de Liège a fait le choix de centraliser la préparation des repas pour ses crèches et écoles, comme pour le CPAS dans l’intercommunale de soin IsoSL.
Via deux cuisines (situées sur deux sites distincts), ce sont plus de 10.000 repas qui sont ainsi préparés quotidiennement et proposés à prix démocratique. Sur ces repas, environ 800 sont réservés aux crèches de la Ville et 2.000 à 3.000 aux établissements scolaires.
Vert Ardent soutient pleinement l’idée de confier à une structure publique (et non privée) la gestion de ce service essentiel. Cela doit permettre, une structure pleinement au service de ses usagers et un contrôle démocratique sur ces choix.
Si un souci nutritionnel est apporté par des professionnels aux repas préparés, que quelques évolutions ont été introduites (quelques repas sans viande sont proposés, ainsi que quelques produits bios), force est de constater qu’aujourd’hui, les achats de fruits et légumes sont conditionnés sous vides ou surgelés et achetés auprès de grossistes.
Il n’y a aucun contrôle sur la provenance des aliments, les conditions de travail des travailleurs agricoles ou encore la qualité sanitaire de ces aliments. C’est un enjeu économique et de santé publique essentiel sur lequel nous souhaitons voir évoluer (plus rapidement) cette structure. C’est possible.
Un des éléments qui complique une transition vers des productions bios et locales est la centralisation opérée (qui implique de gros volumes) et le recours courant à des marchés publics. Cela rend beaucoup plus compliquée (mais pas impossible comme le démontre d’autres structures) une relation privilégiée avec des producteurs locaux dont on connaît les méthodes de travail et la qualité des produits.
Un travail pour découper les marchés en lots (en veillant à être dans la légalité), dans le temps (les répéter 2-3 fois par an sur des critères saisonniers), introduire des critères de sélections (par exemple un lot de fruits de saison bios et locaux, les conditions de travail des ouvriers agricoles, la qualité nutritive des aliments) et d’attribution (par exemple la possibilité de visiter les établissements) est souhaitable mais il n’est pas suffisant. L’utilisation de marchés stock est également à étudier.
Notre proposition
Par nature, nous serions favorables à une logique de plus petites structures, logées au maximum dans les écoles, des « cantines scolaires ». Ceci permettrait de modifier l’échelle des commandes (et donc de se tourner facilement vers des petits producteurs) et d’associer les cantines scolaires aux projets pédagogiques (et donc de faire un travail avec les enfants sur l’importance d’une alimentation saine). Pour des raisons tant budgétaires que sanitaires (règles de l’AFSCA), cela semble peu réalisable à ce stade. En outre, cette option n’est pas forcément praticable partout (dans les petites crèches, pour les repas à domicile…).
Il convient donc de proposer une solution qui permette de reprendre pleinement le contrôle sur la nourriture proposée, son origine, sa qualité nutritionnelle, les conditions de production et l’impact pour l’environnement. Cette solution existe, elle se dénomme régie agricole communale.
Concrètement, il s’agit pour la commune (et/ou son CPAS) de devenir elle-même productrice (en mettant à disposition des terres et en salariant des agriculteurs pour les cultiver). Cela tombe bien, Ville comme CPAS sont propriétaires de terrains. On dénombre pas moins de 62 terrains maraîchers et 37 vergers propriété de la Ville par exemple (même si certains sont forts petits et d’autres à dépolluer).
Par ailleurs, la Ville dispose d’un autre outil unique : son école d’horticulture. Celle-ci dispose de 6 à 7 hectares de terrains (dont 4 ha de plantations fruitières), de matériel agricole (tracteurs, outils, serres, frigos, etc), mais également de personnes compétentes et motivées pour former de futurs maraîchers communaux. Enfin, une structure associative, la CATL, existe pour aider à la mise en place d’un tel projet.
Notre région compte déjà de nombreux jeunes formés et qui souhaitent se lancer dans le secteur agricole, en particulier le maraîchage. La Ville a d’ailleurs mis à sa disposition un de ses terrains pour deux jeunes agriculteurs. Ce que nous proposons est qu’elle fasse un pas supplémentaire en créant une véritable Régie Agricole Communale, éventuellement au départ de la Régie Autonome Communale, aujourd’hui sous-utilisée, ou au départ d’une structure à créer avec l’intercommunale IsoSL et le CPAS de Liège, et ce en synergie avec l’école d’horticulture.
Une régie agricole communale présente divers avantages la relocalisation de la production, un salaire juste versé aux maraîchers pour leur travail le contrôle de la qualité de ce qui est produit. Enfin, on peut envisager que les maraîchers communaux soient à temps partiel détachés dans les écoles pour y sensibiliser à l’importance d’une nourriture saine, ajoutant une dimension pédagogique au projet.
Passer par une telle structure, dès lors que l’on maintient l’objectif de repas à coût démocratique, comme Vert Ardent le souhaite, signifie toutefois un coût pour la collectivité. C’est donc un choix politique. Un choix que nous proposons d’opérer. À nos yeux, ce coût peut être contrôlé et limité. Surtout, il offre des avantages évidents pour la qualité de vie en Ville, son attractivité (et Liège a besoin d’attirer de nouveaux habitants…).
D’autres économies peuvent être pratiquées en parallèle, notamment en réduisant la proportion de protéines animales au profit de protéines végétales moins onéreuses (légumineuses, champignons…). Ici aussi, un travail de communication vers le public devrait nécessairement accompagner la transition.
Une première étape : les crèches
Selon de premières estimations obtenues via la CATL, la surface à cultiver pour fournir les collectivités de la ville en légumes pour l’ensemble des repas produits actuellement par IsoSL oscille entre 80 et 100 ha. Le nombre d’ETP qui seraient nécessaires pour réaliser ces cultures se situerait aux alentours de 50 ETP. Même si cela demeure modéré au regard du service rendu, c’est à nos yeux un objectif qui n’est ni financièrement ni pratiquement gérable pour la Ville vu sa situation financière actuelle.
Le Collège lui-même a envisagé la création d’une régie agricole. Il a tenté de faire financer ce projet ainsi qu’une légumerie via des fonds européens dans le cadre du programme « Urban Innovative Actions ». Même si cela a moins été communiqué, la Ville n’a pas remporté cet appel, et elle a depuis renoncé au projet en raison des coûts qu’elle ne pense pas être en mesure d’assumer.
Nous proposons une autre stratégie, celle du pas à pas. Nous proposons de concentrer l’action de la régie agricole sur les repas fournis dans les crèches uniquement dans un premier temps. Pourquoi ? Parce que cela correspond à une taille gérable. Selon notre estimation et sur base de l’expérience menée à Mouans-Sartoux, commune qui a lancé la première régie agricole en France, fournir les légumes pour l’ensemble des repas des crèches de la ville nécessiterait de mobiliser 6 ha (ce dont disposent largement ville et CPAS) et d’engager entre 4 et 5 ETP (ce qui est financièrement supportable pour une Ville comme Liège) surtout si cela est mené en collaboration avec IsoSL et le CPAS. Il faut compter un peu plus (environ 20-30%) si l’on ajoute les fruits.
Le choix des crèches est symbolique mais il se justifie également d’un point de vue sanitaire dans la mesure où les plus jeunes sont également les plus sensibles à une nourriture de qualité. En outre, d’un point de vue pratique, la préparation des repas pour les crèches est aujourd’hui réalisée dans une cuisine spécifique (séparée de la structure principale) ce qui rend la mise en place d’une telle expérience plus simple (on doit modifier le processus dans une structure plus petite, et sur un seul site).
En conclusion
Nous estimons que la Ville ne peut attendre un hypothétique financement extérieur pour agir (même si celui-ci nous aiderait). Nous estimons qu’il est possible de lancer une première expérience pour des légumes et fruits 100% bios et locaux dans toutes les crèches de la Ville, via la création d’une (petite) Régie agricole.
Lors du prochain Conseil communal, nous proposerons au Collège de créer une task force « Régie agricole » réunissant tous les acteurs de ce dossier (IsoSL, CPAS, Ecole d’horticulture, CATL, élus communaux) afin d’étudier plus en détail le projet, un projet que nous proposons de tenter de lancer dès la rentrée scolaire prochaine
Complément
En parallèle du projet de régie agricole, nous soutenons le projet de création d’une légumerie, afin de faciliter la préparation et le conditionnement des légumes produits par la régie agricole en amont de l’approvisionnement des cuisines, mais aussi de faciliter l’achat pour les restes des repas de légumes frais.
Télécharger la présentation au format PDF
Contacts presse: 0477/20.29.53 (Pierre Eyben), 0486/95.51.03 (Caroline Saal)