Avant d’entrer sur le fond de la motion déposée j’aimerais la contextualiser, dire pourquoi si nous arrivons à dégager une majorité sur ce texte, ce qui est notre souhait, ce sera le signe qu’une dynamique nouvelle est possible pour notre ville.

Un grand nombre des soucis que connaît Liège sont liés à l’étalement urbain, au fait que de plus en plus d’usagers de notre ville et de ses infrastructures font le choix d’habiter hors de celle-ci.

En conséquence, ce sont chaque jour des dizaines de milliers de voitures qui tentent de pénétrer en ville, qui polluent notre air avec un impact direct et massif pour notre santé, qui créent d’immenses bouchons (que le chantier du tram accentue sans doute mais qui sont d’abord le fait de ce flux immense), qui envahissent notre espace public en se garant partout (et surtout n’importe où).

Ce sont des dizaines de milliers de citoyens qui ne paient pas leurs impôts à Liège mais qui souhaitent bénéficier de tout ce que nous y finançons (des voiries, des piscines, des crèches, des écoles, théâtre, opéra,…)

Le leitmotiv de cette majorité c’est que pour éviter cet exode, il faut construire.  Tout le monde cite en permanence comme un mantra le chiffre de 15.000 logements issu du PUM et la répartition ⅓, ⅓, ⅓ entre ville, première et seconde couronne.  Il faut dire deux vérités importantes sur ce sujet.  La première sur le chiffre lui-même. Il est issu du SDALg et est basé sur une croissance de la population dont on voit année après année qu’elle est largement surestimée. Mais cela arrange bien les promoteurs évidemment.  On construit aujourd’hui bien plus d’habitations qu’il n’y a de nouveaux ménages en Wallonie (environ 130.000 logements en plus pour 70.000 ménages depuis 2010). Conséquence : des km2 bétonnés mais aussi des maisons vides par milliers ! La deuxième vérité concerne la répartition. A Liège, nous perdons des habitants tout en construisant. C’est notamment pourquoi avec Vert Ardent, nous pensons que nous avons d’urgence besoin de mieux répertorier et taxer les milliers d’immeubles inoccupés pour les remettre sur le marché et les réoccuper.

Soyons clairs, il faut construire, il faut construire d’abord en ville, et en fait il faudrait bien plus qu’un tiers des constructions de l’agglomération sur Liège.  Mais il faut construire sur base d’un profil socio-démographique et de chiffres de population actualisés, comme nous le réclamons, afin de construire ce dont on a réellement besoin. 

Toutefois, on le voit bien, pour avoir des habitants, il ne suffit pas de construire. Notre conviction avec Vert Ardent c’est que le premier objectif est donc de donner envie de rester vivre en Ville. Et la présence d’espaces verts, comme la qualité de l’espace public (libéré des voitures, sécurisé, accueillant,..) ou des services à la population, c’est essentiel

Et il faut construire sans détruire la nature. C’est faisable. Pour rappel, dans le cadre du SDC, l’étude Baumans-Deffet prouve que les 15 000 logements sont absorbables dans l’existant.

En construisant mal, on fait parfois fuir plus d’habitants que l’on n’en accueille.  C’est ce que l’on fait bien trop à Liège. Et c’est ce qui va se passer si l’on urbanise par petits bouts et sans réflexion globale le site de la Chartreuse.

Lorsque le Collège actuel a validé le projet Matexi (sur un site classé) et l’ouverture de voirie nécessaire à sa réalisation, madame Defraigne a signalé que tout le reste du site était, je cite “sanctuarisé”.

On sait désormais qu’il n’en est rien.  Le bureau Valentiny, mandaté par un potentiel acquéreur du terrain d’Immo Chartreuse, a discrètement tâté le terrain auprès des organisations de riverains ces derniers mois.  Et très probablement également auprès de vous. 

Soyons clair, le Fort des Hollandais qui fêtera ses 200 ans l’an prochain mérite d’être réhabilité et de trouver une nouvelle affectation. Mais y faire 220 logements, un immense parking souterrain, une maison de repos, une résidence service, une crèche, des commerces, deux voies d’accès, le tout au coeur de ce qui est devenu de fait un grand parc urbain, d’un site classé, ce serait de la folie pure.

Et de manière générale, tout promoteur immobilier privé qui va venir pour réhabiliter le fort (aujourd’hui très abîmé) va devoir “rentrer dans ses frais”, et donc proposer un projet bien trop grand et invasif (et en outre des logements de standing inaccessibles pour de nombreuses familles liégeoises).  C’est pourquoi une des clefs pour avoir un projet raisonnable sera forcément d’avoir un acteur public présent pour piloter une solution, comme l’a fait la SPI avec le projet sur le charbonnage du Hasard à Cheratte.

Notre demande avec cette motion, c’est d’éviter de poser des actes irréparables.  C’est de réellement œuvrer à sanctuariser le site tant que le SDC ne nous propose pas une vision claire. Nous ne sommes pas dans une logique nimby, et d’ailleurs les organisations mobilisées sur ce sujet non plus, mais bien de bien commun. Depuis l’acquisition par la Ville d’une partie du site en 1998, le monde a changé, la façon de construire nos villes aussi. Lors des diverses consultations populaires les liégeois ont dit avec force leur attachement à ce site et leur opposition à son urbanisation. Il faut entendre cette voix citoyenne

La Ville n’a pas seule toutes les clefs en main.  La Région doit nous aider. La réalité du premier projet Matexi et celle du second projet sont bien différentes. Mais nous pensons qu’il est possible de trouver des solutions et d’éviter des actes irréparables dans les deux dossiers.

En vous remerciant.

Facebooktwitter