Mes collègues auront l’occasion de creuser les choix politiques demain soir, je me contenterai de souligner quelques points fondamentaux pour nous. C’est un budget qui reproduit beaucoup ce qui se faisait par le passé. Or le contexte a changé, les enjeux aussi. Vous nous présentez un budget fataliste, alors que Liège a besoin d’ambition et de vision à long terme.

 

Il est clair que le maintien des subsides et des financements est un signal intéressant, même si la non indexation aura tendance à affaiblir les acteurs concernés, en particulier dans les secteurs associatifs, sociaux, jeunesse et culturels. Nous vous soutiendrons également, vous le savez, sur la mise en place du genderbudgeting.

 

Notons que le Bourgmestre, qui disait pis que pendre en mars 2019 de la demande de Vert Ardent d’augmenter fortement la dotation communale du CPAS, a finalement adhéré à nos idées. Alors que nous demandions un refinancement à hauteur de 2,5 M de la dotation communale, la majorité fait le geste important d’augmenter de 1,5 M. Comme le veut l’expression populaire, il n’y a qu’une seule catégorie de personnes qui ne change pas d’avis, et nous sommes heureux que la réflexion qui nous animait sur la croissance de la pauvreté à Liège et sur les conditions de travail au sein de l’institution ait trouvé une résonnance et qu’en 6 mois, vous ayez perçu la pertinence, l’urgence mais aussi la faisabilité de cette mesure.

 

Un autre fondamental sur lequel vous avez décidé d’agir est le financement de la zone de police liégeoise. Guy Krettels aura l’occasion de développer plus particulièrement les mesures. C’est sur les mesures de bien-être au travail que j’insisterai particulièrement. Outre les questions de matériel, il est important de remplir le cadre afin de permettre une rotation des agents sur le terrain. Le paiement des heures supplémentaires n’est pas une compensation aussi qualitative que celle du congé et du repos.

 

La fiscalité, pourtant cheval de bataille du MR et source de nombreuses promesses de campagne, est frappée de tétanie. A l’écurie, le rééquilibrage de la taxe urbaine non ménage. Vert Ardent se retrouve désormais isolé pour défendre une taxe non ménage plus juste et plus progressive tout en visant la neutralité budgétaire. Pour rappel, notre proposition repose sur

  • une approche par catégorie pour respecter la Loi :
    • exonération pour les résidents (ils paient déjà une taxe urbaine),
    • un taux pour les indépendants complémentaires,
    • un deuxième pour ceux en personne physique,
    • un troisième pour les TPE/PME,
    • un dernier pour les grandes entreprises.

– un système simple, car le temps des citoyens-entrepreneurs et celui des agents communaux est précieux.

La prime promise également par le PS aux familles monoparentales a disparu des radars. Pour rappel, il s’agissait de l’octroi d’une prime de 50 € par an et par enfant pour les familles monoparentales domiciliées sur le territoire communal. Si celle-ci est reportée pour causes de mauvaise prévision, un geste en faveur des places en crèches serait à même de soutenir les familles monoparentales.

 

Si le Plan Urbain de Mobilité permet d’avancer sur les corridors vélo et si des moyens supplémentaires sont mis dans l’achat de vélo et de trottinettes à louer par la Ville, les dépenses de fonctionnement pour la gestion de Vélocité, soit Pro Vélo, en restant identiques, ne permettront pas d’offrir un service d’entretien suffisant : l’augmentation significative du nombre de cyclistes entraîne une demande forte et des files d’attente. Et ceux qui, comme Vert Ardent, estiment que l’engorgement lié aux travaux du tram est une opportunité pour développer l’usage du vélo, comme cela s’est souvent produit dans d’autres villes ayant entrepris ce type de travaux, en sont réduits à constater que le Collège ne l’a visiblement pas compris…

Les embouteillages restent l’angle mort de la politique mobilité du Collège, malgré l’amplification des travaux du tram en 2020. Seulement 30 000 euros pour le transport alternatif dans le cadre du chantier du tram. On continue dans les places Shop & drive et les horodateurs gratuits à Noël… De quoi laisser penser que la campagne demandant de « changer de mode » est de l’argent perdu, tant les mesures et le message sont schizophrènes. Or l’envie de vouloir se garer près de là où on fait ses courses n’est pas réaliste dans une ville congestionnée comme la nôtre. Ce samedi, en début de soirée, il fallait entre 40 minutes et 2h pour quitter le parking de la Médiacité, créant de vives tensions dans le quartier. Ce problème se produit dans différents endroits de la ville. La stratégie communale de gestion des travaux du tram consiste également à laisser ouvert à la circulation le maximum de voiries. Dans les deux cas, se produit le même phénomène, celui du goulot d’étranglement, l’entonnoir. Pour nous, l’accompagnement de mesures alternatives au trafic automobile doit être renforcé (navettes bus, plan de mobilité Entreprises…). Comme vous en parleront mes collègues demain, il faut réorienter les budgets mobilité et de la cohérence.

 

Le logement devrait être un enjeu central dans une ville où la population est confrontée un fort taux de chômage et où de fortes inégalités existent au sein de la population. Alors que les logements vides sont estimés à plus de 3000, le sort réservé à l’Agence immobilière sociale, un des outils pour remettre ces logements à disposition, est incompréhensible.  Elle continue d’être clairement sous-exploitée. Or le mal-logement et la densification de la ville en préservant des espaces verts nécessitent la dynamisation de cet outil. Ces enjeux nécessiteront également une créativité des pouvoirs publiques. À l’heure actuelle, cette créativité est absente. Pierre Eyben et Laura Goffart développeront cette analyse demain.

 

Quelques choix budgétaires ont carrément manqué de nous étrangler tant ils contrastaient avec le discours de la majorité prétendant tenir fermement les cordons de la bourse. L’indexation, c’est presque pour personne, sauf pour les Ardentes. La formule est exagérée : oui, la Ville intervient pour aider l’un ou l’autre acteur culturel ou associatif en difficulté (la ferme des enfants, les infirmiers de rue, le Trianon…), mais aucun, aucun ne voit l’aide financière octroyée multipliée par 5. Vous prétendez subir un chantage de la part des Ardentes, Vert Ardent n’y croit pas. Nous pensons au contraire que c’est la stratégie de la Ville de mettre le paquet pour accueillir un festival d’ampleur et ainsi renforcer son statut métropolitain. C’est pour cette raison que vous n’avez pas voulu débattre des options proposées par la SPI pour relocaliser le festival et que le Conseil communal n’a rien eu à dire. Est-ce qu’ici, tout le monde apprécie les Ardentes ? Oui. Est-ce que nous pensons qu’en période de vaches maigres, quintupler le transfert d’argent public vers du privé est une priorité ? Non.

 

Enfin, sans surprise pour celles et ceux qui nous ont écoutés en commission, il nous faut revenir sur le budget participatif d’1M. Un budget participatif, qu’est-ce que c’est ? C’est un processus par lequel la population définit la destination des ressources publiques, en général une partie ou la totalité du budget d’investissements (ce qui correspond au budget extraordinaire en Belgique). C’est une revendication phare de Vert Ardent, et le Collège a inscrit cette mesure dans sa Déclaration de Politique communale et dans son Programme Stratégique Transversal. Liège 2025 était le processus de dépôt et de vote des projets. Nous avions des réserves sur le projet mais il a le mérite d’exister. La suite paraissait logique, la confection de budgets participatifs à hauteur de 1M d’euros devait être couplé aux projets déposés dans Liège 2025 et ayant récolté des suffrages importants. C’est d’ailleurs écrit dans le Programme Stratégique Transversal, la feuille de route officielle du Collège. Je vous cite “Dans le cadre du « budget participatif » annuel d’un million d’euros, le Collège communal intégrera les projets identifiés dans le cadre du processus « Liège 2025 » dont la faisabilité et la pertinence technique, budgétaire et temporelle aura été étudiée en associant les porteurs de projets.” Le mystère planait toujours sur la méthodologie, la répartition des budgets (plusieurs projets à des montants variables ? Un seul projet pour l’ensemble de la somme ?). Il est désormais clairement dissipé. Liège 2025 est un projet à la Magritte : ceci n’est pas un budget participatif. Aucune suite n’est donnée à Liège 2025.

Mais heureusement pour le Collège, Willy Magritte est accompagné de Christine Copperfield qui nous annonce 1,3 M de budget participatif, ventilés comme suit : 1M pour l’aménagement d’un nouveau parc sur l’ancien site Palmolive et 300 000 euros pour les abords de la passerelle Vivegnis. Les deux projets sont très intéressants. Nous ne nions ni la qualité du projet, ni l’implication des services qui incorporent les citoyens à la réflexion sur l’aménagement de cet espace. Cependant, un budget participatif, ce n’est pas financer un chouette projet, décidé et entamé sous les législatures précédentes d’une part, et non sollicité dans Liège 2025 (uniquement 21 votes). Vous nous dites que le CRAC n’est pas fan. Pas de souci, vous savez quels projets ont été rendus dans Liège 2025. Vous pouvez leur dire. La mise en œuvre de Liège 2025, c’est zéro pointé. Prétendre autre chose, c’est de la mauvaise foi.

 

En conclusion, ce budget, c’est l’habituel todibonisme liégeois et des promesses non tenues. Face aux nombreux enjeux, de densification, de vieillissement et de précarité de la population, de climat ; face aux difficultés financières que nous connaissons ; il faut vous réveiller. La transparence, c’est bien. L’action, c’est mieux.

 

Caroline Saal, cheffe de groupe Vert Ardent

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