Avis de Vert Ardent sur le Plan Urbain de Mobilité

Pour Vert Ardent, la version actuelle présente une vision cohérente, ambitieuse et durable de la métropole liégeoise, tout en mettant en évidence les ambitions et enjeux de mobilité auxquels l’arrondissement de Liège devra faire face à l’horizon 2030. Ceux-ci qui impliquent des changements en profondeur des déplacements au sein de l’agglomération liégeoise. Toutefois, cet avis favorable doit être nuancé. Il sera conditionné à ce que le Gouvernement wallon tienne compte des nécessités suivantes :

  1. Rendre prioritaires les modes alternatifs à la voiture individuelle grâce à

A) Une planification claire

Le PUM propose d’inverser la hiérarchie traditionnelle des usagers et de privilégier d’abord l’accessibilité et la mobilité piétonnes, puis cyclables, puis des transports publics, et en dernier lieu des autres modes routiers. Cette politique est en concordance totale avec les engagements de Vert Ardent.

Cependant, en politique, il ne s’agit pas d’écrire l’intention pour qu’elle se réalise. L’ancien PUM a trop montré que, sans planification contraignante, les autorités publiques ont tendance à piocher dans les projets favorisant le transport automobile, en dépit de la durabilité de leurs choix. Il est donc essentiel qu’une planification, avec des phasages clairs, suivant rigoureusement cette hiérarchie, soit explicitement intégrée dans le PUM. Cette planification permettra une réalisation cohérente des objectifs décrits.

B) Des budgets

Les constats du PUM sur la situation actuelle met en lumière le retard de 20 ans pris en matière de mobilité durable (piétons, cyclistes, transports publics), et la nécessité pour y remédier de dégager des financements de l’ordre de 1 milliard d’euros d’ici à 2030 ; c’est la priorité absolue.

L’inversion de la hiérarchie des usagers doit se traduire concrètement par une affectation des budgets pour les aménagements visant à favoriser les infrastructures alternatives, et à créer une intermodalité forte entre les infrastructures piétonnes, cyclables et le réseau structurant de transports en commun.  Les études et les moyens à mettre en œuvre devront être adaptés pour réaliser cette priorisation.

À titre d’exemple, Vert Ardent rappelle que le tram coûtera, sur les 27 années du partenariat public-privé, 200 millions d’euros de moins que prévu. Ces montants doivent venir abonder une enveloppe contribuant au financement de la modernisation du système de mobilité durable de la Métropole liégeoise. Cette enveloppe doit aussi pouvoir être alimentée par une partie de recettes liées au péage kilométrique des poids lourds, même s’il faut pour cela revoir le mécanisme actuel en vertu duquel ces recettes ne peuvent être affectées que sur le réseau routier régional structurant ; ce type de recettes doit pouvoir contribuer à des investissements sur tout type de voiries (régionales ou communales), et bien entendu contribuer aux investissements en faveur des modes durables !

À ce titre, Vert Ardent note que les actions prioritaires du PUM pour les piétons et les vélos sont moins nombreuses et moins détaillées que celles pour les projets de réseau routier, alors que ces actions en faveur des piétons et vélos demanderont plus d’énergie pour être mises en œuvre. Nous attirons donc l’attention de tous les niveaux de pouvoir sur l’importance de dégager des budgets à affecter prioritairement à ces aménagements. Les étapes à franchir entre la conception et la réalisation sont longues et souvent complexes : il y a donc urgence à entamer immédiatement le travail pour aboutir à des résultats tangibles d’ici à 5 années (voire d’ici à 2022 pour certaines réalisations devant accompagner le tram).

  1.  Risquer la liaison autoroutière CHB ? Non !

La mise en place du tronçon d’autoroute CHB est reprise dans le PUM comme une possibilité. Ce projet est la continuité du tout-à-la-voiture et ne ferait que le renforcer. Il aurait des incidences environnementales négatives sur la préservation des espaces naturels protégés, la préservation du maillage écologique, la limitation de l’artificialisation des sols, la lutte contre le réchauffement climatique, la réduction de la part modale des véhicules individuels.

Par ailleurs, au sud de l’agglomération liégeoise, nous anticipons un risque d’accroissement de la périurbanisation. Cet aménagement pourrait entraîner la localisation de nouvelles activités en des lieux faiblement ou non desservis par les transports en commun structurants. La création de nouveaux parcours et de nouveaux nœuds routiers pourraient être le motif de création de nouvelles Zones d’Activités Economiques (Z.A.E).

Le soulagement à attendre des reports de flux empruntant la liaison CHB serait assez faible (EIE 2007, RIE 2018) et CHB n’aurait d’effet notable sur le centre-ville de Liège que moyennant  des aménagements préalables et contraignants sur les quais et dans les quartiers.

Alors qu’un phasage rigoureux des aménagements reste impératif, la liaison CHB n’est pas une solution contribuant à promouvoir des modes alternatifs de mobilité aux véhicules individuels, d’une part, parce que chaque augmentation de la capacité routière conduit indubitablement à la saturation et non l’inverse, et d’autre part, parce que la réalisation de cette portion autoroutière risque d’avoir un impact défavorable sur l’augmentation globale de la pollution.

Une solution pourrait être d’exiger la suppression de la zone de réservation au Plan de secteur et la gestion volontaire en termes de parc des terrains déjà acquis par la Région Wallonne.

  1. Donner une valeur et une fonction centrales au PUM

Bien que le décret du 1er avril 2004 ne lui confère qu’une portée indicative, Vert Ardent souhaite que le Plan Urbain de Mobilité soit LA référence obligatoire, contraignante, qui permette de motiver des décisions, notamment en matière de permis d’urbanisme aux niveaux communal et régional.

Vert Ardent propose donc de créer les conditions pour que le Plan Urbain de Mobilité joue pleinement son rôle d’outil stratégique d’aménagement du territoire de la métropole et de la Ville, en veillant à l’articuler plans et programmes en matière de mobilité : SOL – Schémas d’Orientation Locaux (ex-PCA), PCM (plan communal de mobilité), plans triennaux de travaux, plans complémentaires au tram (par exemple, les lignes de transport en commun sur les futurs axes structurants, les localisations de P + R – Parcs-Relais,…).

À ce titre, nous souhaitons que les stratégies, plans et permis d’urbanisme octroyés par la Région, les communes de l’arrondissement en général, et la Ville de Liège en particulier, soient en conformité avec les objectifs identifiés dans le PUM qui, à l’exception notable de CHB, contribuent à un développement plus durable en comparaison avec les tendances « au fil de l’eau ». De même, les communes et la Région devront privilégier des aménagements concrets visant à améliorer les déplacements piétons, en vélo et la vitesse commerciale des transports en commun.

  1. Saisir les opportunités liées à l’opérationnalisation du PUM

Les réalisations à entreprendre (tram, réseau hiérarchisé de bus structurants, P+R, réseaux cyclables, zones 30,…) devront renforcer l’utilisation multimodale de moyens de transport alternatifs à la voiture individuelle tout en offrant à tous les Liégeois.es une diversité de choix des moyens de déplacement (nouveaux arrêts de train, billetterie unique, application qui intègre les différents modes de déplacement et offre aux Liégeois.es une continuité dans l’utilisation de tous les modes, y compris les diverses formes de voiture partagée).

Vert Ardent propose de transformer les désagréments prévisibles du chantier du tram en opportunité pour les modes de mobilité durable. Le calendrier des travaux imposera plusieurs adaptations provisoires des réseaux routiers, de bus,… Autant d’opportunités à anticiper pour réorienter les habitudes de déplacements des habitants de la Métropole vers une mobilité plus durable.

Il s’impose donc de travailler dès à présent à des actions indispensables pour minimiser l’impact du chantier du tram sur l’accessibilité de la ville et de l’agglomération, comme la mise en service rapide d’un accès au Sart-Tilman par un troisième axe de bus par la rive droite (projet de L148 – premier des 15 axes de bus à prioriser), une offre cyclable accrue,…

  1. Développer une agence de développement territorial à l’échelle supra communale et la participation citoyenne et la légitimité démocratique

Pour Vert Ardent, il est indispensable d’avoir une approche coordonnée de la mobilité et de l’aménagement du territoire à l’échelle de l’agglomération. C’est pourquoi, au plan technique, nous proposons la création d’une agence de développement territorial pour coordonner la mise en œuvre du PUM dans sa dimension “mobilité” comme dans sa dimension “développement territorial”. D’un point de vue démocratique, la création d’une instance politique représentative des conseils communaux, et pas seulement des bourgmestres à titre personnel, s’impose en complément à l’échelle de l’agglomération : le Conseil métropolitain, sur la base du mécanisme de représentation indirecte utilisé pour les intercommunales.

Au niveau communal, nous appuyons le renforcement des ressources humaines pour les modes de déplacement doux, pour la création des axes de bus structurants (investissements et mesures de gestion sur les voiries communales pour en améliorer les conditions de circulation, leur vitesse commerciale, leur régularité et leur confort), pour les actions de gestion de la mobilité,  les actions sur les comportements,…

Par ailleurs, Vert Ardent considère la participation citoyenne indispensable à toute réflexion sur la mobilité, et à l’accompagnement de la mise en oeuvre des stratégies ainsi arrêtées. À cet égard, l’accompagnement des projets d’aménagement ou d’adaptation durant les travaux devront être discutés avec les citoyens.