Monsieur le Bourgmestre,
Madame l’échevine des finances,
Messieurs et Mesdames les échevins,
Chers collègues,
Permettez moi de commencer en remerciant les services et les membres du collège pour la riche commission mais aussi pour la réponse à nos questions
Vous nous aviez annoncé des années difficiles. En 2025, en dépenses générales, le budget est plombé par des remboursements de dette et d’intérêt de la dette à 125 M. Les recettes générales, elles, fondent de 40 M, principalement en raison de la dégressivité brutale de la tranche Oxygène (RW). Le budget extraordinaire, autrement dit ce qui permet à Liège de se développer, est réduit à peau de chagrin. Vous nous avez promis une union sacrée pour sauver Liège. Vous nous avez dit que vous étiez contraints par les autres niveaux de pouvoir et les obligations imposées par la Région wallonne. Nous ne reviendrons pas sur les difficultés générales, le coût de la centralité dont nous parlons depuis des années dans ce Conseil.
Nous voulons nous intéresser à l’exercice budgétaire en tant que tel. L’intervention de Vert Ardent relèvera surtout deux angles : 1. C’est un budget de choix politiques. Certes, les temps sont durs, mais oui, vous avez fait des choix. Et ces choix vont mettre à mal la cohésion sociale de Liège. C’est un budget anti-familles. C’est un budget anti-cohésion sociale.
- Vous nous demandez d’acheter un chat dans un sac. Ce budget manque de transparence. “On va faire des économies” “Chez qui ?” “On verra bien”.
Avec une telle orientation politique, Liège va devenir un château de carte. Au moindre coup de vent, elle sera par terre.
Il y a une maxime qui dit : Quand le singe veut monter sur le cocotier, il doit avoir les fesses propres.
Vous défendez ce budget comme celui de la responsabilité. Si on vous écoute, vous n’avez pas eu le choix. Alors, oui, la Région wallonne vous a imposé des contraintes. Mais non, vous n’avez pas appliqué la même règle partout. Non, tout n’a pas été réduit de manière équitable. C’est faux. C’est bel et bien un budget de choix politique.
C’est faux de dire que toutes les recettes de transfert ont diminué de 15 %. Certaines sont intactes, voire sont engagées sur fonds propres.
C’est un choix politique de couper 5Millions dans l’enseignement en diminuant les sorties culturelles, les aides à la remédiation scolaire, le soutien aux enfants défavorisés ou la formation des enseignants tout en décidant de ne pas toucher à la politique événementielle Par ex, le festival du sapin de Noël même budget ; l’éclairage festif même budget ; les frais de réception, diminution marginale (moins 7%), les dépenses pour les grands événements pareil. Comprenez-nous bien. Évidemment que dans un contexte ordinaire, nous n’aurions pas grand chose à redire sur le festival du sapin de Noël. Mais dans quel contexte sommes-nous aujourd’hui ? Liège a souvent été gourmande en frais de protocole, particulièrement pendant les années électorales. Aujourd’hui, c’est indécent. Couper des rubans au festival du sapin de Noël oui, les gamins, non. Les gamins n’ont pas à être une variable d’ajustement.
Autre variable d’ajustement : l’environnement. C’est aussi un budget anti-environnement. A l’extraordinaire, la Ville inscrit 41 k de dépenses en 2025 contre 375 k en 2023 ! – 330 000 euros. L’environnement, c’est pas – 15%. Il reste 11% du budget !
C’est un choix de mettre fin à Place aux artistes, qui permet à de nombreux artistes d’égayer la Ville pendant l’été,offre des possibilités de se produire aux artistes, renforce l’accès à la culture, contribue à la cohésion sociale et au développement culturel de la Ville, mais de laisser encore 8 agents et 89 000 euros d’aide directe à un gadget politique qu’est Liège Ville santé. C’est un exemple mais j’aurais pu citer : la diminution de moitié du financement aux musiques actuelles, la diminution d’achats de livres pour les bibliothèques mais aussi la diminution importante aux centres sportifs.
C’est un choix de diminuer la politique d’accès à des toilettes publiques. L’inverse de ce qui était écrit dans le programme communal du PS qui entendait le développer.C’est un choix de diminuer les collectes de déchets et les poubelles publiques (fin annoncée de la collecte des encombrants, ramassage des PMC et cartons réduit alors que les sacs bleus récupèrent désormais une grande proportion des déchets, 500 poubelles publiques supprimées) alors que nous sommes nombreux de nous plaindre de la saleté de Liège.
C’est faux de dire que les impôts sont inchangés. Vous avez choisi, et vous le répétez, de ne pas toucher à l’IPP. Mais les taxes augmentent. C’est un choix de tripler les recettes des redevances administratives en faisant payer désormais les papas ou co-parentes qui viennent à l’État civil leur enfant. Alors que c’est déjà un moment de grandes dépenses, l’arrivée d’un enfant. Les Engagés ont fait campagne contre la taxe de la mort, pour mieux créer celle sur la naissance. C’est un choix de tripler (tripler!) les redevances quand on déménage et qu’on doit occuper un bout de trottoir.
Problème 1 : la population liégeoise n’est pas une tirelire ! Ce sont des familles monoparentales, des étudiants, des pensionnés, des personnes sans emploi, … Ce n’est pas une population aisée, mais elle aura encore besoin d’accéder de déclarer ses enfants, de réserver une place de parking pour amener ses meubles.
Problème 2 : le pire dans cette augmentation de taxes, c’est qu’elle n’est pas suivie d’amélioration du service. Par exemple, les occupations de voirie sont souvent chaotiques. Et l’augmentation de la taxe ne signifie pas que les moyens pour encadrer suivront. Les files devant la cité administrative ne se résorbent pas parce que le prix des cartes d’identité augmente (x10 pour les enfants, obligatoires pour les enfants de parents divorcés, de personnes migrantes qui entrent voir leur famille ou de familles qui partent en vacances).
C’est donc un budget anti-familles. C’est essentiellement la faute d’un gouvernement régional et fédéral déconnecté du réel, mais également par vos propres choix.
Quid des économies vertueuses ? Nous demandons encore un grand plan d’économies d’énergie, à l’ordinaire comme à l’extraordinaire. Mais l’ambition n’est pas là.
La ville nous demande en plus d’acheter un chat dans un sac. Vous ne nous dites pas tout concernant les économies prévues. C’est un manque de transparence inadmissible quand les Liégeois ont besoin de savoir de quoi demain sera fait.
Le crédit spécial de recettes de 9,3M : écriture comptable pour dire que la Ville va faire 9,3M d’économies mais on ne sait pas où. Nous connaissons l’artifice. Oui, la Ville n’engage jamais tout en un an. Mais là, elle choisit, elle assume qu’elle ne reportera pas à 2026 ce qu’elle ne réussira pas à faire en 2025.
Le collège nous dit « plus de services gratuits », mais ne veut pas nous en dire plus. Qu’est-ce que cela va changer dans la vie des Liégeois ? Le prêt de matériel pour les fêtes de quartier, il n’y aura plus ou ça sera payant ? Combien vont coûter les garderies scolaires ? Vous inscrivez une recette de 500 000 euros pour 10 000 enfants. Sachant qu’elle s’appliquera à partir de septembre visiblement, ça donnerait environ 50 euros par enfant et par quadrimestre. 125 euros par an. A nouveau, quel manque de soutien pour les familles et notamment les parents qui travaillent ou recherchent un emploi.
Autre tabou de ce budget. La Ville prévoit un remboursement des agents détachés c’est-à-dire des travailleurs qui soutiennent les missions de centre sportif, de centre culturel, de Liège propreté, de la Maison de la Presse, etc. Ils sont inscrits au budget comme rapportant 600k en plus que les autres années. C’est une somme non négligeable, même répartie sur la tête des XX travailleurs concernés. Qui va payer ? Liège Propreté n’est pas en capacité de payer. La Maison de la Presse n’est pas en capacité de payer. Les centres culturels, les centres sportifs… ? S’ils ne sont pas en capacité de payer, ils vont potentiellement mettre la clé sous le paillasson, premier problème. Deuxième problème : c’est donc des recettes très hypothétiques. S’ils ferment, c’est aussi une non-rentrée pour la ville. C’est un plan loose-loose.
Lions cela à l’augmentation des produits de location immobilière. Certains acteurs institutionnels vont déguster : moins de subsides, un loyer plus cher, un agent détaché plus cher. C’est invivable. Le secteur social, jeunesse, culturel, est attaqué de toute part, etc ‘est loin d’être une vache à lait, d’autant qu’il est également mis en difficulté. Les politiques d’égalité, de lutte contre le sans-abrisme, culturelles sont également attaquées aux autres niveaux de pouvoir. Est-ce qu’on veut la mort de cet associatif ? Est-ce qu’on veut l’éloigner du public, avec lequel il devrait être en étroite interaction, pour le livrer au mécénat privé, dépendant des valeurs de celui-ci et de ses propres objectifs ? Est-ce qu’on veut affamer cet associatif qui va se livrer à la concurrence ? Est-ce qu’on veut que les maisons de jeunes deviennent des adversaires entre elles ?
La Ville nous cache également ses choix en politique du personnel. Quand nous demandons où le non remplacement d’agents aura lieu, on nous balade en revenant aux grandes responsabilités à prendre. Oui mais où ? Les budgets environnementaux s’écroulent mais les besoins sont toujours là. Les Liégeois sont toujours en attente d’une ville verte et respirable par tous les temps. La foresterie urbaine est déjà trop petite pour entretenir le parc arboricole. Que se passe-t-il si des agents partent à la pension ? Les mairies de quartier sont des lieux importants pour l’info à la population. Le personnel est en difficulté, n’arrive pas à tenir des délais légaux.
La Ville nous cache des mesures qui vont impacter les habitants, et elle nous cache des fermetures de service. Ce manque d’informations empêche un vrai débat politique sur le présent et le futur de la ville.
Et c’est là-dessus que je voudrais conclure. Ce budget 2025 est présenté comme si les finances publiques étaient une fin en soi, et non un moyen. Comme si l’important était avant tout d’avoir des recettes, plutôt que ce que la Ville va en faire. Vert Ardent en serait presque à applaudir le maintien du financement de l’Agence immobilière sociale ou de Liège Energie, alors que nous savons que c’est déjà insuffisant et que le logement de qualité est un enjeu fondamental à Liège. Mr le Bourgmestre, vous avez parlé d’une maîtrise budgétaire accrue. Pour qui ? Et à quel prix ? A quel prix ? Or c’est un équilibre à trouver, et il est toujours politique.
Inquiète pour la chose publique, ce n’est pas viable de piloter Liège de la sorte. Ce n’est pas viable de répercuter la situation actuelle sur les familles qui habitent Liège, sur son environnement fragile et sur les acteurs sociaux, culturels,qui tentent de prendre soin de sa cohésion sociale.
Caroline Saal, cheffe de groupe Vert Ardent

