Le Conseil communal de la Ville de Liège, réuni en séance publique du 29 mars 2021,
Considérant la motion « Stop aux camps dits ‘de rééducation’ au Xinjiang et à la répression à l’encontre des Ouïghours et d’autres minorités musulmanes » votée sur proposition du Parti Socialiste au Conseil communal de la Ville de Charleroi le 25 janvier 2021 ;
Considérant l’article 2, §1 de la Déclaration universelle des Droits de l’Homme selon lequel chacun peut se prévaloir de toutes les droits et toutes les libertés proclamés dans ladite Déclaration, sans distinction aucune, notamment de race, de couleur, de sexe, de langue, de religion, d’opinion politique ou de toute autre opinion, d’origine nationale ou sociale, de fortune, de naissance ou de toute autre situation ;
Considérant la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide de l’Organisation des Nations Unies du 9 décembre 1948, signée et ratifiée aussi bien par la Belgique que par la Chine ;
Considérant les engagements européens et internationaux pris par la Belgique pour le respect des droits fondamentaux des personnes et en particulier des plus vulnérables : Déclaration universelle des droits humains, Convention européeenne de sauvegarde des droits humains, Déclaration des droits de l’enfant, Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels ;
Considérant les valeurs défendues par la Constitution belge notamment en ses articles :
- 11. La jouissance des droits et libertés reconnus aux Belges doit être assurée sans discrimination. À cette fin, la loi et le décret garantissent notamment les droits et libertés des minorités idéologiques et philosophiques ;
- 19. La liberté des cultes, celle de leur exercice public, ainsi que la liberté de manifester ses opinions en toute matière, sont garanties, sauf la répression des délits commis à l’occasion de l’usage de ces libertés ;
- 23. Chacun a le droit de mener une vie conforme à la dignité humaine. À cette fin, la loi, le décret ou la règle visée à l’article 134 garantissent, en tenant compte des obligations correspondantes, les droits économiques, sociaux et culturels, et déterminent les conditions de leur exercice ;
Considérant qu’en août 2018, le Comité des Nations Unies pour l’élimination de la discrimination raciale a mis en cause le gouvernement de la République populaire de Chine en raison des abus commis au Xinjiang, notamment en raison de la création de camps de détention arbitraire de masse; qu’en septembre 2018, lors de son tout premier discours après sa prise de fonction, Mme Michelle Bachelet, Haute-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme, a pris acte des “allégations profondément préoccupantes d’arrestations arbitraires à très grande échelle d’Ouïgours et de membres d’autres communautés musulmanes, internés dans des camps dits de rééducation dans tout le Xinjiang”;
Considérant que la population ouïghoure constitue une minorité ethnique (avec sa propre langue et culture) et une minorité religieuse, que les stérilisations/avortements forcés ont déjà fait baisser le taux de natalité au sein de la population ouïghoure, que les transferts d’enfants ouïghours séparés de force de leurs familles pour être internés dans des établissements sous tutelle du régime central communiste constituent des actes constitutifs du crime de génocide, que plusieurs témoignages et rapports d’ONGs indiquent l’intention de détruire (mens rea) ce groupe ethnique en particulier ;
Considérant le positionnement de la Ville de Liège en faveur de la défense des Droits humains, notamment via la motion « Liège ville hospitalière » ;
Considérant la solidarité de la Ville de Liège avec toute minorité qui dans le monde ferait l’objet de discriminations ou répression, dans ce cas les minorités musulmanes ouïghoure et kazakhe également ;
Le Conseil communal demande que :
- La Belgique évalue l’existence d’un risque sérieux de commission d’un génocide contre la minorité musulmane ouïghoure au Xinjiang ;
- Des délégations internationales puissent se rendre en toute indépendance et liberté de mouvement dans la région du Xinjiang afin d’enquêter sans contrainte sur les camps qui s’y trouvent et la répression dénoncée à l’encontre des Ouïghours et autres minorités musulmanes ;
- Selon les résultats de ces enquêtes, des sanctions sévères puissent être envisagées par les gouvernements européens et les organisations internationales à l’encontre des responsables présumés de cette répression ;
- Toujours en fonction des résultats de ces enquêtes et de la gravité des faits qui pourraient être révélés dans ce cadre, des juridictions internationales puissent se saisir du dossier en toute indépendance ;
- De manière générale, les gouvernements belges et européens se prononcent en totale opposition à l’existence de « camps de rééducation par le travail » en Chine et également aux événements qui sont dénoncés ;
- Les 83 entreprises multinationales, listées dans un document intitulé « Uyghurs for sale » établi par l’Australian Strategic Policy Institute, cessent immédiatement toute collaboration pour l’exploitation de main d’oeuvre issue de la Province du Xinjiang en attendant les résultats des enquêtes internationales ;
- La législation soit adaptée pour qu’en toute circonstance, la complicité de l’exploitation forcée de travailleurs soit formellement interdite et durement sanctionnée ;
- La Belgique et les états européens mettent en place une politique d’aide et d’accueil spécifique pour les Ouïghours et autres minorités musulmanes qui fuient le Xinjiang.
La Ville de Liège, en tant que commune hospitalière, marque sa solidarité avec les prises de position en faveur de la défense des droits des Ouïghours et autres minorités persécutées au Xinjiang.
La Ville de Liège s’engage aussi à être porte-parole auprès des autorités politiques belges des Ouïghours et autres minorités musulmanes qui sont enfermées dans ces « camps de rééducation » et font l’objet d’une répression dénoncée au niveau international.
Le Conseil communal de la Ville de Liège demande enfin que cette motion soit envoyée à Monsieur le Premier ministre, Madame la Ministre des Affaires Etrangères, aux Ministes-Présidents des Entités fédérées, à l’ensemble des présidences de partis représentés au sein des différents parlements belges.
Caroline Saal, Guy Krettels, Laura Goffart et Virginie Godet pour le groupe Vert Ardent
Motion pour le Conseil Communal du 29 mars 2021