INTRODUCTION
Le 8 mars, journée internationale de lutte pour les droits des femmes, nous rappelle cette année que le chemin est encore long et semé d’embûches à la lumière des dernières nouvelles comme la montée de l’extrême droite à travers le monde.
En Belgique, comme dans de nombreux pays, les femmes font encore trop souvent face à des obstacles systémiques qui entravent leur participation au travail, à l’emploi, à la santé, mais aussi à la politique.
De nombreux droits ont été gagnés dans la rue, dans l’espace public mais aussi dans les hémicycles. Des militantes, des travailleuses, des femmes continuent chaque jour de vivre des discriminations et des atteintes à leurs droits.
Les violences sexistes et sexuelles s’immiscent dans les débats et les décisions politiques. Cela tend à réduire la voix des femmes et à les invisibiliser. Depuis toujours, les femmes sont écartées du pouvoir et des décisions.
Cela fait un peu plus d’un siècle que les femmes peuvent voter aux élections communales.
Dernièrement, les élections locales ont eu lieu et à peine 20% de femmes bourgmestres et seulement 30% des femmes étaient têtes de liste. Il y a même moins de femmes élues qu’à la législature 2018-2024.
La place que les femmes occupent comme candidates, élues, ou travailleuses du personnel de l’administration et communal n’est pas toujours une position facile. Elles doivent travailler doublement et prouver qu’elles sont à leur place. Les exigences à leur égard sont élevées et la moindre erreur leur est souvent fatale. Elles doivent de plus évoluer dans un climat qui leur est parfois hostile.
Les violences sexistes et sexuelles en politique sont parfois insidieuses, des blagues, des petites remarques, des gestes qui sont légion depuis trop longtemps.
De nombreuses femmes ne se lancent pas en politique par peur des retombées, d’autres finissent par abandonner à cause des remarques mais aussi des difficultés à pouvoir jongler avec leur travail, leur famille et les horaires parfois compliqués des conseils communaux.
La politique est le miroir de notre société. C’est par ici, que nous pouvons faire avancer les droits des femmes et nous nous devons d’être exemplaires.
Le mouvement #MeToo a permis une prise de conscience du grand public sur les violences sexuelles, de genre ainsi que le harcèlement. Cela a permis des réformes juridiques et culturelles qui doivent encore être soutenues. En France, un observatoire des violences sexistes et sexuelles en politique a été mis en place. Dernièrement, dans la commune bruxelloise de Schaerbeek, c’est une charte qui a été mise en place après des faits de violences sexistes et sexuelles à l’égard d’une échevine.
Le conseil communal de Liège se doit d’avancer sur ces questions, libérer la parole et permettre un climat serein sans violences sexistes et sexuelles aux femmes qui sont élues et qui travaillent chaque jour à améliorer les politiques de la Ville.
MOTION
Vu la Déclaration pour l’élimination des violences à l’encontre des femmes de l’ONU de 1993 ;
Vu le rapport et la note d’orientation de l’ONU sur la violence à l’égard des femmes en politique de 2021 ;
Vu le principe de non-discrimination consacré à l’article 14 de la Convention européenne des Droits de l’Homme ;
Vu la Résolution (459) du Congrès européen des pouvoirs locaux et régionaux afin de lutter contre le sexisme à l’égard des femmes en politique au niveau local et régional (2020);
Vu les engagements pris par la Belgique en matière de lutte contre les violences à l’égard des femmes dans le cadre la Convention d’Istanbul de 2011 ;
Vu les articles 10 et 11 de la Constitution garantissant l’égalité entre les femmes et les hommes et leur garantissant l’exercice de leurs droits et libertés ;
Considérant la motion contre le sexisme en politique votée par le conseil communal de Liège en 2019 en soutien aux élues communales victimes de sexisme et d’intimidation sexiste ;
Considérant l’étude de l’UGent et de l’ULB relative au sexime envers les candidat·es aux élections de juin 2024 qui démontrent non seulement que les candidates sont plus souvent la cible d’agressions et de sexisme en ligne ou dans la vie réelle, mais aussi que l’impact potentiel sur leur vie peut les mener à ne pas vouloir s’engager ou quitter la politique et constitue un gros problème pour la démocratie à long terme ;
Considérant que cette même étude démontre que les femmes sont deux fois plus touchées par les réactions sexistes sur les réseaux sociaux que les hommes élus, que 83,8% des attaques ciblant des figures politiques visent des femmes ;
Considérant l’ensemble des témoignages des femmes élues de tous les partis sur les remarques sexistes, les agressions vécues ;
Considérant que seulement 30% de femmes étaient tête de liste aux élections locales en Wallonie en octobre 2024 et que seulement 20% des bourgmestres sont des femmes ;
Considérant que la parité en politique est loin d’être atteinte et que l’ensemble des niveaux de pouvoir doivent agir pour permettre aux femmes d’exercer des mandats politiques ;
Considérant que les violences sexistes et sexuelles concernent aussi les femmes qui travaillent pour et avec des élu·es ;
Considérant qu’en Belgique, une femme sur deux est victime de sexisme et que 43% des femmes ont vécu des situations de sexisme au travail ;
Considérant une étude française qui démontre que 74% des femmes élues localement subissent du sexisme ;
Considérant le manque d’instances et de moyens pour que les femmes puissent dresser un état des lieux des violences vécues dans la société et notamment dans le milieu politique ;
Considérant la nécessité d’un cadre apaisé pour l’ensemble des élu·es et l’importance de la représentation dans notre démocratie ;
Considérant que notre société doit encore avancer sur le domaine des violences faites aux femmes et que cela se joue aussi en politique ;
Considérant que les hommes doivent prendre conscience de leurs comportements et bannir les comportements sexistes, humiliants, dégradants et les violences sexuelles ;
Considérant que l’ensemble des élus a un rôle à jouer ;
Considérant qu’il faut soutenir les femmes en politique afin de faire avancer les droits de toutes ;
Considérant qu’en plus du sexisme, des élu·es subissent du racisme et du classicisme portant préjudice à la représentation politique ;
Considérant qu’il faut garantir notre démocratie et que les violences sexistes et sexuelles ont des conséquences sur celle-ci ;
Considérant l’émergence et le soutien nécessaire à un #MeToo politique ;
Considérant le travail de la commission Femmes et ville de la Ville de Liège et sa volonté d’avancer pour renforcer et maintenir les droits des femmes ;
Considérant qu’il faut garantir les droits des citoyen.nes, des femmes travaillant dans les milieux politiques : les militantes, les élues, les collaboratrices, les fonctionnaires ;
Le conseil communal de Liège demande au Collège :
- De mettre en place un groupe de travail, constitué de représentants de chaque groupe politique, d’associations luttant contre les violences sexistes et sexuelles afin de travailler sur les violences sexistes et sexuelles en politique à l’égard des élues et des personnes travaillant dans les cabinets et l’administration ;
- De mettre en place un questionnaire afin de quantifier les faits de violences sexistes et sexuelles ;
- De mettre en place une formation à l’égard des élu·es et du personnel communal sur le sexisme et les violences sexuelles ;
- De mettre en place une charte d’engagement et d’actions sur la base des résultats du questionnaire et du groupe de travail afin de lutter contre les violences sexistes et sexuelles en politique. Cette charte devra :
- Identifier les comportements sexistes ;
- Prévoir la mise en place d’outils de prévention et de prise en charge clairs et transparents ;
- Informer les membres du conseil communal, du collège, des cabinets et de l’administration des procédures et dispositifs existants ;
- Mettre tout en oeuvre pour faire cesser tout propos et comportement sexistes;
- Mettre en place des principes directeurs solides ;
- Permettre de libérer la parole et l’écoute ;
- De faire signer à l’ensemble des élues et des élus, des chefs de cabinet, des directeurs financiers et communaux cette charte afin que chacun et chacune s’engage individuellement ;
- D’intégrer cette charte au règlement d’ordre intérieur et au sein du règlement du travail ;
- De signer la Charte Européenne pour l’Égalité des femmes et des hommes dans la vie locale.
Laura Goffart, Caroline Saal, Elena Chane-Alune, Silvana Zilli et Sarah Tshinguta Mussenge pour le groupe Vert Ardent
Motion déposée en vue du conseil communal du 31 mars 2025

